L’esprit de la loi est-il respecté ?

Une disposition de la loi du 24 mars 2014 entrée en vigueur le 27 mars 2014 est venue compléter les dispositions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 :

« – lorsque le terme du contrat de location en cours intervient moins de trois ans après la date d’acquisition, le bailleur ne peut donner congé à son locataire pour vendre le logement qu’au terme de la première reconduction tacite ou du premier renouvellement du contrat de location en cours »

Une difficulté est née du terme « acquisition » utilisé par le Législateur. En effet, rappelons que selon l’article 711 du Code civil la propriété des biens s’acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l’effet des contrats (exemple : la vente).

Faute de précision, une lecture prudente du texte implique de considérer que tous les moyens d’acquisition sont visés, incluant la succession. En pratique, les conséquences pour l’héritier sont terribles. Ce dernier se voit privé de la faculté de donner congé pour vendre au terme du bail en cours, il est tenu d’attendre le premier renouvellement, alors même qu’il se voit contraint de payer immédiatement les frais de succession liés à cette acquisition.

La jurisprudence va-t-elle lever cette incertitude ?

Une première décision semblait l’indiquer (Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – chambre 4, 12 mars 2019, n° 16/17263). Arrêt confirmatif par lequel le Magistrat écarte l’application de la disposition précitée de l’article 15 :

 « Considérant en effet, comme l’a pertinemment relevé le premier juge, que l’objectif de cette disposition, laquelle déroge au principe selon lequel la vente transmet à l’acquéreur les droits dont le vendeur disposait sur le bien cédé, est de protéger les locataires de mutations à but spéculatif ;

Que, compte tenu de la nature particulière de la dévolution successorale qui intervient par l’effet conjugué de la nature et des règles légales la gouvernant, et donc sans autre manifestation de volonté que l’acceptation, la disposition précitée de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 qui vise « l’acquisition d’un bien loué», ne saurait trouver application ; »

Cependant, cela ne clôture pas le débat puisque la même cour vient rendre une décision inverse le 6 octobre 2022 (CA Paris, pôle 4 – ch. 4, 12 mars 2019, n° 16/17263). La cour juge que s’agissant de l’application des dispositions précitées, ces dernières sont d’ordre public et «  un congé délivré pour le terme du bail alors qu’il reste moins de trois ans d’occupation au locataire est nul » . La cour poursuit en indiquant que « contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, il ne résulte pas du texte précité que les conditions énoncées ne s’imposent qu’aux acquéreurs à titre onéreux d’un bien occupé et non aux acquéreurs à titre gratuit, comme c’est le cas en l’espèce; il n’y a donc pas lieu d’ajouter à la loi, protectrice des droits du locataire, une condition qu’elle ne contient pas ».

Il convient désormais de connaître la position de la Cour de cassation…

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